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Note : 8/10
Je n’ai peur de rien… Ou de pas grand chose… Je suis Réanimateur, que diable, ne l’oubliez pas ! De la tripaille faisandée, de la bidoche éventrée, j’en débite à longueur de journée, le tout arrosé comme il se doit de sérum vert fluorescent grand cru millésimé ! Alors histoire de varier les plaisirs dans ce monde de metal que nous aimons tous tant, je joue parfois à un jeu plus dangereux, une sorte de roulette russe musicale. A l’heure où tant de mécréants téléchargent à tout va, sans s’occuper d’autre chose que de ces 0 et ces 1 enfilés comme des perles à un collier et finissant par produire de la musique, j’attache une importance capitale à l’objet, à cet écrin tangible renfermant les trésors que je recherche avec avidité, tel un Tomb Raider des temps modernes. Et je sais que nous sommes légion à pratiquer cet art désuet, car il faut bien avouer que la plus obscure pochette du plus trouble des groupes de thrash a cent fois plus de gueule que la misérable photo(shopée) du dernier Madonna !
Alors de temps en temps, comme un gamin, j’achète un album par le simple attrait de sa pochette, vibrant du plaisir un brin sadique, je le concède volontiers, de me demander quel sort va me réserver le contenu de l’objet. Un pari risqué, qui se révèle ma fois souvent payant (pas toujours, faites gaffe quand même, j’en ai fait les frais aujourd’hui – ouille ouille ouille ! -, mais je tairai par courtoisie le nom de l’ignoble coupable) !
J’ai ainsi craqué pour la magnifique pochette de l’album de Shadowkiller, Slaves of Egypt, avec Horus et Anubis maniant le fouet sur des esclaves au dos courbé, le tout sur fond de pyramides et d’un magnifique soleil couchant. Et à parcourir les articles de mes collègues anglo-saxons, je ne suis visiblement pas le seul à avoir cédé à la tentation quasi hypnotique de l’achat compulsif. Félicitations donc à Dimitar Nikolov (Dantesco, Titan Force, Prowler, Portrait…) qui, je l’espère, sera reconduit pour l’opus à venir. Ci-joint le lien vers le site de l’artiste pour ceux qui comme moi apprécient : http://www.dimitarnikolov.com/
Petite rétrospective avant d’aller plus loin. Nous sommes en 2013, quelque part sur la Bay Area californienne. Et qui dit Bay Area dit immanquablement… thrash metal… Vous suivez, c’est bien ! Mais vous avez tout faux !!! Shadowkiller s’est formé autour du guitariste/chanteur Joe Liszt (Hellhound, Rocka Rollas, Ancient Empire), du cogneur Gary Neff (les deux lascars se sont connus dans le groupe thrash Hellhound, ceci expliquant finalement cela), du bassiste Dan Lynch et du guitariste Marc Petak. De thrash il n’est point question ici, même si quelques riffs ici et là rappellent d’où l’on vient, comme chez les grands frères d’Iced Earth. Et comme la bande à Schaffer, Shadowkiller délivre un power metal racé, possédant du muscle, mais aussi de la mélodie, le tout finement entremêlé au sein d’une construction pyramidale suffisamment cohérente pour ne perdre personne en chemin. Le monstrueux riff ouvrant Seven Kingdoms rappelle ainsi à s’y méprendre la guitare de Schaffer, tout comme la puissante rythmique enrobe l’ensemble de l’album à la façon du gang de la Terre Glacée. D’autres influences majeures se font entendre, présentes elles-aussi dans l’oeuvre d’Iced Earth. Je pense ainsi à Iron Maiden, à Saxon et à la NWOBHM en général, mais aussi aux accents plus complexes de Fates Warning, et l’on sent tout d’un coup que le prog metal n’est pas loin, avec les nombreux changements de rythme ponctuant la plupart des morceaux, les breaks et les ponts qui cassent la linéarité de l’ossature purement heavy.
La voix chaude et puissante, parfois éraillée, de Joe Liszt, sait donner du corps aux textes inspirés par la mythologie égyptienne et les œuvres de fantasy. Et l’on retourne ici immanquablement à l’objet pour découvrir les textes de Seven Kingdoms qui – Valar Morghulis ! -, parlent du désormais célèbre et incontournable pavé de George R.R. Martin, Game of Thrones !
Nul besoin au chanteur de forcer son talent – même s’il s’avère peu adapté sur l’insupportable A Walk in Reality -, car tout est dans le timing chez Shadowkiller, la voix s’appuyant sur la rythmique au diapason du batteur Gary Neff (écoutez le formidable Savior à la technique jouissive !) pour prendre une proportion dantesque propre à donner le frisson. La basse lourde et rampante de Dan Lynch n’est pas en reste, bien mise en valeur par une production ne laissant personne en retrait même si je lui reproche de ne pas donner assez de puissance à la batterie (c’est de ma faute, j’adore quand ça cogne à s’en disloquer les épaules, comme sur le Plagues of Babylon d’Iced Earth justement !).
Les morceaux de poids sont bel et bien présents, significatifs d’un groupe qui a réellement des choses à proposer, comme le triptyque ouvrant l’opus, composé du titre éponyme, du tonitruant Heart of Judas, par moment thrashisant, et du déjà cité Seven Kingdoms. Il y a encore Savior et le clairement progressif On These Seas, ainsi que l’épique The Human Project. Il est juste dommage que les autres morceaux semblent parfois tourner en rond et donner l’impression de livrer la même recette, même si une écoute attentive délivrera de belles surprises. Petite erreur de jeunesse qui sera sans doute corrigée sur le prochain opus actuellement en préparation.
Shadowkiller peut s’inscrire dans la liste des fers de lance du power metal progressif américain auprès de Division, Pharaoh ou encore Sacred Oath. Découvert par le label indépendant Stormspell Records, spécialisé dans les sorties heavy/power/thrash traditionnel et les rééditions de démos des années 80 et 90, le groupe californien satisfera amplement les fans de power américain, genre moins rugueux que celui pratiqué par ses cousins du vieux continent mais plus versé vers la mélodie. L’aspect progressif teinté d’épique comblera également les fans de Symphony X, Time Requiem ou Majesty, s’ils acceptent néanmoins l’absence d’influence néo-classique.
Fort de ce premier indéniable succès, Shadowkiller a depuis signé un contrat avec le label Pure Steel Records et son deuxième bébé – Until the War is Won – est sorti en 2015 (je pense revenir dessus prochainement). En attendant, je recommande à ceux qui vont aimer Shadowkiller de se pencher sur Ancient Empire, nouvelle incarnation de Joe Liszt (en duo avec Steve Pelletier) qui occupe cette fois le poste de chanteur, guitariste et bassiste – rien que ça ! -, et pousse plus loin l’aspect heavy de sa musique, sans en oublier l’aspect épique, avec une influence cette fois plus européenne (Iron Maiden toujours, Judas Priest, Primal Fear). Les deux entités sont pour moi les deux faces d’une même pièce. Je me promets d’ailleurs de revenir sur cet album tout simplement for-mi-da-ble !
Bon, maintenant que vous m’avez lu, courez acheter l’album !… Je compte jusqu’à trois, et après je cherche le scalpel…
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