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Attention ! Coup de cœur !
Tout droit sorti des forges encore chaudes du studio Psykron/WaveLight Factory, dirigé par Phil Reinhalter – dit « le Boss » (PUTRID OFFAL, UNDEAD PROPHECIES, FORLORN EMOTION, DIVISION ALPHA), « Order Of The Mist » est la superbe découverte faite en ce début d’année 2023 dans laquelle je vous propose, cher.es Huldras et Huldres (c’est en ces termes, renvoyant aux séduisantes créatures issues de l’imaginaire nordique, que le groupe s’adresse à sa communauté), de vous immerger aujourd’hui.
Trempé dans le folklore scandinave à travers un concept et des textes tirés des « Chroniques de Hyldr », annoncé comme le livre de la mystérieuse chanteuse Lady IX, on sait que l’on va voyager entre contrées et histoire, à la croisée des mondes et des cultures. Car s’il est question d’épopée Viking, de navigation, de Walhalla, de magie mortelle, de Valkyrie mais également d’une combattante japonaise, c’est bel et bien des ténèbres de notre cher underground franco-belge qu’émerge le quintet HYLDR (prononcé Hildeur).
Pour enfoncer le clou de son univers, le groupe cultive tout un mysticisme autour de son image. De l’énigmatique personnage masqué, vêtu d’un kimono, répondant au nom de Lady IX d’un côté, et de l’identité des musiciens passée sous silence de l’autre, il y a là un secret orchestré et entretenu que j’aime à respecter. Les curieuses et curieux trouveront sans doute, au travers du Net, quelques liens avec d’autres groupes de nos contrées…
La tessiture vocale de Lady IX participe aux arcanes de ce projet. Tantôt graves, profondes, larges, et d’attribution masculine, tantôt célestes, aériennes, lyriques et d’attribution féminine, ces voix semblant donner vie à un théâtre de multiples personnages sont pourtant issues d’une même incarnation. Voyageant entre les genres, elles interrogent nos représentations. Cependant, a-t-on véritablement besoin de connaître le sexe d’un.e interprète pour en apprécier son art ? Clairement non. Ce que nous avons là relève simplement du talent, nul besoin d’aller plus loin.
Qu’en est-il musicalement ?
« Order Of The Mist » pourrait très bien trouver sa place sur vos étagères aux côtés d’œuvres de YEARNING, AGE OF SILENCE, voire d’anciens KATATONIA, étant ici question de Dark Metal, de Doom Gothic, de Rock atmosphérique mais surtout de musique mélancolique et profondément mélodique.
A la découverte des premiers singles vidéo annonciateurs de l’album, c’est ce timbre grave me renvoyant à celui de Kristoffer Rygg (ULVER, ex-ARCTURUS, ex-BORKNAGAR, etc.) qui m’a d’emblée cueilli. Mais comme abordé plus haut, il n’était question que d’une facette de la personnalité vocale de Lady IX. Il y a un énorme et bluffant travail sur les voix. Parfois fragiles et plaintives, parfois nobles et déterminées, elles jouent avec les expressions et la sensibilité. Les pistes se superposent, s’harmonisent, se répondent, se laissent la place, se marient pour former des chœurs angéliques. Passez-vous l’album au casque, vous entendrez un espace tapissé de voix qui iront jusqu’à évincer le clavier pour constituer elles-mêmes des nappes atmosphériques.
Le travail instrumental laisse une grande place aux guitares qui, à l’unisson ou chacune à leur manière, dialoguent, chantent, pleurent… vivent, tout simplement. L’intention mélodique et harmonique parcourt l’ensemble des chansons et rappelle même çà et là l’école classique du Heavy Metal, voire cette ère où PARADISE LOST croisait le Doom et le Heavy pour réinventer le Metal gothique.
Tout ceci repose sur un solide socle rythmique. La basse au grain travaillé, dédoublé clair et saturé, enveloppe le spectre sonore, tandis que la batterie martèle les tempi graves et modérés. Sans futiles bavardages, elle apporte l’essentiel de ce que les morceaux réclament. Et de nos jours, ne pas trop en faire apparaît parfois comme une prouesse !
Du doux démarrage piano/voix de « Heart Of Soil » au superbe final en apothéose clôturant l’album, HYLDR développe 8 compositions croisant passages oniriques, crépusculaires, sépulcraux, enivrants, ésotériques, glaciaux, épiques. « My Gallant Assassin » aura une expression plus progressive avec son entrée acoustique, un solo clair tout en atmosphère et son développement sur 7 minutes. « Your Frozen Chest », plus direct et intelligemment utilisé en single pour entrer dans l’univers musical, rampe pour marquer la mémoire. L’épique et orchestral « Bed Of Germs » côtoie des instants contemplatifs et plein d’émotions. « Like Dying Ferns » évolue vers un Rock gothique mélancolique et « Woodland Shrine » a des accents pouvant rappeler « The Siren Of The Woods » de THERION avant d’entamer une partie plus urgente qui restera, pour moi, la plus intense de l’album.
Suffisamment complexe tout en étant très accessible, il faut plusieurs écoutes pour qu’« Order Of The Mist » délivre l’ensemble de ses secrets. Peut-être manque-t-il néanmoins quelques refrains plus immédiats et identifiables, mais là pourra être une piste pour la suite à donner à cet acte de naissance.
Enfin, s’il y a beaucoup de profondeur dans l’écriture, on en retrouve également dans la mise en son organique et équilibrée. Au milieu de la noirceur ambiante, on reconnaît la patte de Phil « le Boss », apportant une belle lumière à cette œuvre réussie.
Il est un peu tôt pour parler des sorties significatives de l’année mais il est évident qu’« Order Of The Mist » est un album appelé à durer. Celui d’un groupe à l’identité déjà bien marquée.
Passionnant, tout simplement !
…
…
… Hé, attendez, ne partez pas…
Maintenant que vous êtes conquis.es, qui peut lancer la pétition « HYLDR, filez-nous des CDs et des vinyles ! » pour qu’ « Order Of The Mist » sorte en version physique ?? Non parce que, hein, les plateformes d’écoute, c’est bien des fois mais ça rentre pas sur ma platine !
1 commentaire sur “[Chronique] HYLDR – « Order Of The Mist »”