[chronique] GEORGES KOLLIAS – Invictus

Herbert Al West - Réanimateur Recalé
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Note : 7,5/10

Par Ouranos ! Par Cronos !

Citer ces deux noms n’est pas anodin de ma part car déjà s’y révèle une promesse de haine sans nom, le premier, père de l’autre, ayant vu son fiston trancher dès sa naissance avec une faucille la virilité de son cruel paternel…

Pour rester dans la mythologie grecque, je dirais que l’homme qui va nous intéresser tout au long de cette chronique, George Kollias, est sans nul doute possible un autre des enfants d’Ouranos, le premier maître du monde ayant avec Gaïa enfanté outre les titans les terrifiants Hécatonchires, êtres fantastiques dotés de cinquante têtes et de cent bras. Rien d’étonnant quand on connait la force de frappe du cogneur hellène, doté d’une rare capacité à enchaîner de dévastateurs blast-beats à tour de bras. Les muscles de forgeron du grand Héphaïstos dans le corps de l’intrépide Léonidas, voilà qui illustre bien le gaillard, et il ne lui aurait ainsi pas fallu 300 spartiates pour repousser les hordes de perses dans l’étroit défilé des Thermopyles : dès les premiers blasts d’Invictus, les barbares seraient remontés en courant dans leurs galères, abandonnant sur place armes et boucliers.

Les Spartes de l’antiquité avaient pour eux l’orgueil démesuré d’une vie passée à s’exercer et l’assurance d’une culture au faîte de sa gloire. C’est un peu le cas du batteur, devenu sans prétention maître de son art auprès de son groupe de prédilection, Nile, groupe éprouvant quant à lui un amour sans bornes pour la culture égyptienne ! Le batteur s’est aussi illustré auprès de Tyr, ADE, Nightfall, Cerebrum et Deus Infestus.

Après 25 ans de carrière, le grec ne connaissant pas la crise s’est décidé à sortir son propre album solo, et à l’inverse de la tendance des justiciers masqués, il opère à visage découvert, nommant humblement son projet… Georges Kollias. De mémoire de chroniqueur traînant justement derrière lui 25 ans de metal, il s’agit d’une première, car j’ai beau chercher, je ne me souviens pas d’un projet se nommant Gene Hoglan, Mike Portnoy (et pourtant, il n’en manque pas de projets !!!), Dave Lombardo ou Mike Terrana pour ne citer que les noms les plus connus.

Avec une signature chez Season of Mist – rien que ça ! -, George Kollias nous sort ainsi Invictus, sur lequel il a tout composé de A à Z, s’investissant jusqu’à jouer bien sûr de la batterie mais aussi des différentes guitares, laissant cependant à de prestigieux amis (Dallas Toler-Wade et Karl Sanders de Nile, George Emmanuel de Rotting Christ, Bob Katsionis de Firewind et Mike Papadopoulos de Cerebrum), le soin de s’occuper des soli de guitare ou de synthé les plus techniques. Quant au chant, assez proche de celui de Karl Sanders d’ailleurs, il est laissé à Mike Breazeale (les albums solo de Karl Sanders et des vocaux sur Nile) et Efthimis Karadimas (Nightfall).

Tout commence par une intro pharaonique réussie nous plongeant dans les ambiances sombres et antiques chères à Nile. Puis tout se déchaîne sur le morceau éponyme, nous révélant ce à quoi nous allons avoir droit tout au long de l’album, à savoir un death metal progressif basé sur un riffing lourd, souvent lent, hypnotique, enroulant ses notes autour d’une batterie forcément omniprésente, le tout relevé de quelques courts soli de guitares ne volant jamais la vedette au batteur (manquerait plus que ça sur un album de… batteur !!!). Le morceau est bien construit, doté d’une production en béton armé, et on pense immanquablement à Morbid Angel, Behemoth et Nile, avec une forte orientation sur les percussions. Puis arrive le morceau suivant, The Passage, qui – hormis le fait qu’il est relevé de quelques percussions orientales et que la vitesse s’est sensiblement accélérée -, donne le sentiment étrange d’être toujours plongé dans le morceau titre. Les riffs sont encore plus hypnotiques, procurant un sentiment d’urgence et de danger que renforce son ambiance alarmiste (putain, j’ai dû couper le mauvais fil, tous les gardes du goulag vont me sauter dessus !!!). Quant aux blasts, ils ont encore monté en puissance, mettant KO l’auditeur. C’est peut-être ici la faiblesse – toute relative, je vous rassure – de l’album : l’alignement de morceaux assez proches les uns des autres, tous dotés d’une puissance et d’une aura indéniables, mais ne laissant à aucun des rejetons de Kollias le soin de s’élever au-dessus de la mêlée.

On remarquera tout de même Voices, avec son rythme presque indus et le travail rythmique impressionnant apporté sur la double pédale. Et aussi Apocalypse, formidable instrumental carrément ambiant marqué par des percussions jouant cette fois-ci en retrait d’un long solo de clavier joué tout en finesse, le tout relevé par des violons et quelques accords de guitare acoustique. Sublime ! Peut-être la véritable surprise de l’album, car l’hellène vénère n’était pas attendu sur ce terrain.

Invictus se révèle en fait comme un très bon album de death metal moderne, auquel il manque peut-être juste un peu de variété, de diversité. George Kollias surprend tout de même l’auditeur à maîtriser si bien les différentes étapes de la construction de cette pyramide musicale, qu’il s’agisse de l’écriture, de la composition ou des instruments joués. Sachant que sa marge d’expression au sein de Nile sur ces différentes étapes est plutôt limitée, on comprend d’autant mieux l’envie du musicien de s’exprimer en solo et saluons la prestation accomplie.

Et comme le nouvel opus de Nile, What Should Not Be Unearthed, est sur le point de débouler dans les bacs, je ne saurais que trop vous conseiller l’écoute de cet Invictus, à déguster comme un apéritif déjà corsé !

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