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Note : 6/10
ANGRA, c’est la classe !
Voilà une vérité simple pour tout fan de heavy-power-machin- étiquettes à tiroirs. Et si vous n’êtes pas de cet avis, vous apprendrez bien vite qu’avec Bernard-Henri Leviathan, on ne touche pas à ANGRA, au risque de vous voir poursuivi sur les réseaux sociaux à coups de commentaires pénibles et sans intérêt à chacune de vos publications !
ANGRA, c’est avant toute chose une première période indétrônable qui aura largement contribué, au cœur des années 90, à façonner un pont entre le speed d’HELLOWEEN, le néoclassique de Malmsteen et les grandes partitions du classiques du 18ème siècle. Pont largement emprunté ensuite, à l’aube des années 2000, jusqu’à en faire un chemin de pèlerinage bondé par les hordes de musiciens assoiffés de symphonie ! ANGRA a également su pousser l’exubérance de QUEEN en la couplant au folklore de son natal Brésil (la sexualité musicale enfante parfois de drôles d’oiseaux). Enfin, ANGRA, c’est une rupture en 2000, deux renaissances aussi prestigieuses l’une (avec Edu Falaschi au micro) que l’autre (sous le nom de SHA(A)MAN et conduite par l’inégalable Andre Matos). Une reconstruction toujours plus progressive mais une lente et désolante descente vers la chute…
Bon, vous voyez où je veux en venir ! Pour ceux qui font semblant de ne pas avoir compris, non, notre webmaster ne s’est pas trompée entre la publication de la chronique d’un hypothétique nouvel album d’ANGRA et celle d’ALMAH dont l’illustration attend sagement en haut de la page que je veuille bien commencer à évoquer son contenu. ALMAH, pour ceux qui n’ont pas tout suivi (et décidément, vous le faites exprès), est le projet parallèle avec lequel Edu a sorti 3 albums depuis 2006. En compagnie, au départ, de musiciens issus de groupes abonnés aux prix (NIGHTWISH, KAMELOT, STRATOVARIUS, etc.), puis avec le concours de musiciens locaux ainsi que de Felipe Andreoli, bassiste et compère chez ANGRA, ALMAH constitue une échappatoire dont l’idée est de proposer un terrain d’expression plus agressif. Alors quand, en 2012, Edu annonce son départ du géant brésilien en mal de hauteur, ALMAH reste son principal refuge.
Des difficultés de tessiture vocale, une baisse de motivation, tels étaient les motifs du départ du chanteur. Une prise de conscience quant à l’insurmontable difficulté pour un baryton d’interpréter, au fil des ans, des titres réclamés par le public mais conçus à l’origine pour une voix de ténor exceptionnellement hors-norme. Et ceci amène au propos tenu dans ALMAH et notamment sur ce « Unfold », 4ème album du groupe donc, car Edu Falaschi tient à montrer ce dont il est capable sans plus passer par les cordes les plus aigües de son arc vocal. Un registre médium, parfois grave et surtout plus agressif qu’à l’accoutumé.
Alors, bien sûr, j’aimerais ne pas baser cette chronique uniquement sur ce qui risque d’être, au fur et à mesure de la carrière du groupe, l’éternelle comparaison avec ANGRA. Pourtant, avec « In My Sleep » ouvrant l’album, on a bien l’impression d’entendre Edu reprendre là où il s’était arrêté avec le « Aqua » de son précédent groupe. Au cours de l’album, beaucoup d’éléments familiers sont retrouvés : descente de tomes typiques d’un jeu de batterie tribal, chœurs éloquents, speederies harmonisées, soli débordants de feeling rappelant la paire Loureiro/Bittencourt jusqu’au son employé (et cette autre paire Barbosa/Di Padua excelle également dans les techniques les plus folles du shred). Quelques accroches plus symphoniques comme l’intro de « Believer », ces interludes disséminées dans l’album ou encore le très progressif et réussi « Treasure Of The Gods », avec sa ligne de chant rappelant celle de « Nova Era », mettront la puce à l’oreille.
Seulement, il serait injuste pour ALMAH de s’arrêter à ces comparaisons. Car, ce qui frappe réellement dans ce groupe, et « Unfold » poursuit dans cette lignée, c’est la grande part laissée à la modernité, au son lourd et écrasant, parfois pataud, apporté par des guitares accordées six pieds sous terre. Un petit air de Zakk Wylde semble trainer ci et là, comme sur « The Hostage » ou « Cannibals In Suits » avant de réengager la chanson sur des passages plus mélodiques que ce soit au travers des guitares ou des refrains. Cette approche plus thrash, plombée, se retrouve tout au long de l’album et, couplée au style typique, apporte une formule assez originale (« Beware The Stroke », « I Do »). D’autres titres (le refrain de « Beware The Stroke », « Raise Of The Sun », « Wings Of Revolution ») apparaissent comme plus mainstream avec une utilisation du piano pouvant même rappeler une vague rock gothique. Bien sûr, il faut compter également sur les ballades. « Warm Wind » ne révolutionnera pas le genre et le court « Farewell », simplement habillé de piano et de voix, refermera cet album de manière confidentielle. Et enfin, « You Gotta Stand » tiendra lieu de curiosité par ses abords stoner et alternatif. Son refrain étonnamment proche d’un registre tourné vers le FAITH NO MORE de la période « The Real Thing » et ses intonations ALICE IN CHAINS apporteront un groove surprenant au milieu des déferlantes speed mélodiques.
Et dans tout cela, Edu Falaschi semble à l’aise dans un registre qui lui sied davantage. Il use et module sa voix au gré des styles. Son timbre chaud se fait tantôt posé sur les passages tout en douceur, tantôt ouvert sur des médiums vibrants, plus grave, avec un grain agressif, voire également hurlé sur les passages les plus intenses. Quelques notes aigues d’antan sont encore bien présentes mais se font plus rares.
Seulement, car oui vous avez vu ma note, tout n’est pas rose en dépit de la fleur qui s’ouvre sur le visuel. Plusieurs écoutes seront nécessaires pour pouvoir appréhender le contenu de ce disque. « Unfold » est un album varié mais dense, consistant et même parfois indigeste par sa longueur, son accessibilité non immédiate, sa difficile entrée en mémoire. Il en reste un album agréable au titre à titre, à la maîtrise instrumentale irréprochable (tiens je n’ai pas parlé de ce superbe intermède sur fond de basse slappée sur « I Do ») mais qui manque du charisme qu’on attend d’un nom tel que celui d’Edu Falaschi. Peut-être suis-je trop exigeant mais j’attends un peu plus du personnage. Souffrant de la comparaison avec ANGRA, le groupe tente l’évitement en explorant de nouveaux terrains mais on y revient par la force des choses et force est de constater qu’il y manque sérieusement de classe. Cette classe. Celle propre à ANGRA !