[Chronique] VIRGIL – « Acheron »

Bernard-Henri Leviathan
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Ni de Rome, ni du charriage des eaux de l’antique Grèce, nous parvient VIRGIL mais bien de nos contrées nordistes et, ce, depuis maintenant 6 ans. S’il n’est ici question de littérature à proprement parler – bien que Marius (chant) semble particulièrement inspiré par le patrimoine mythologique de notre monde pour construire ses textes – on peut concéder au groupe un certain goût pour le raffinement…. Mais un raffinement carnassier et empreint de brutalité, car « Acheron », second album de la troupe, soigne une tourmente noire et malsaine pour contribuer à repousser les limites de l’extrémisme musical. Une tourmente à laquelle ont succombé le label Source Atone Records et l’agence de com’ Singularités (merci à l’éminent Romain Richez !) pour épauler le groupe dans cette nouvelle pierre posée.

Après une introduction éponyme orchestrée, le théâtre des saturations explose sur les 11 titres suivants. Renvoyant parfois à ANAAL NATHRAKH, LORNA SHORE, BEHEMOTH ou l’art noir de l’ancienne garde, VIRGIL déploie une musique compacte et millimétrée, sorte de coulure de lave noire, portée par la batterie omniprésente et hautement technique de David et les multicouches intéressantes de voix alternant, ou superposant fry scream et growl, produisant alors un bel effet de dimension. Derrière, les guitares de Julien et Thomas, parfois plus aériennes, et la basse enveloppante de Charles se fraient un chemin dans l’épais brouillard asphyxiant, le temps d’une accalmie, de quelques arpèges (« Nil ») ou même d’un interlude complet (« Charon »), sorte de respiration mélodique au milieu du tumulte sonore. Ceux-ci ne sont néanmoins pas légion, le groupe préférant marteler ses ambiances délétères et se prémunir de la redondance en marquant ses titres de nombreuses ruptures rythmiques et en cela, comme il est de tradition dans le genre, la double pédale se voit attribuée un rôle important dans l’évolution des morceaux et dans le spectre sonore. On passe du Deathcore au Black moderne, parfois quelques passages plus lourds et low-tempi s’approcheraient presque d’un Doom-Death, ou même du Sludge, du moins le temps d’un riff (« Immaculate »).

Si le tourbillon de la première partie de l’album laisse parfois planer en moi une certaine sensation de monotonie face au mur de son compact et très rythmique, attendant le support d’un riff fort ou l’envie d’entendre le groupe expérimenter encore en avant le cadre de sa pratique, la seconde partie du disque répondra davantage à cette attente. Ainsi « Hunt » a ce quelque chose de plus construit autour de lignes mélodiques. « Mother » a une intention créative particulière avec le travail d’une ambiance plus majestueuse et lumineuse, rappelant certains méfaits de, j’ose la référence, CRADLE OF FILTH. « Ignis » s’ouvre sur un riff presque Black’n Roll me ramenant à l’inspiration viking d’anciens groupes de la scène scandinave. Une superposition de chant extrême et de voix claires, des guitares en spirale qui s’affolent, un montage d’atmosphère autour de quelques notes de piano, de cordes menaçantes et lancinantes, de voix murmurées à la manière d’un certain Shagrath (DIMMU BORGIR)… je me dis que le groupe tient peut-être quelque chose pour la suite de ses partitions et a, sans l’ombre d’un doute, encore de nombreux atouts à exploiter.

En définitive, VIRGIL propose avec « Acheron », un album massif et dévastateur, au potentiel imposant pour le live, dont les fans du genre se délecteront mais dont la densité pourra également perdre les moins initiés… En même temps, est-ce à ceux-ci que VIRGIL s’adresse ? Ces autres peuvent toujours tenter la traversée à la nage jusqu’à l’autre rive. Dans ces eaux poisseuses et assassines, le challenge sera alors d’éviter le sombre dessein du nocher sur sa barque. Munissez-vous tout de même d’une obole, on n’est jamais assez prudent.  

 

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Source Atone Records Big Cartel 

 

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